Un revenu pour tous

L’Ontario offre désormais un revenu minimum garanti à certains de ses résidents. Mais de quoi s’agit-il exactement ?

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Le gouvernement pourrait-il un jour payer pour nos besoins essentiels ? C’est une question à laquelle plusieurs économistes et politiciens dans le monde s’intéressent actuellement. En sachant que l’automatisation transforme le marché du travail et qu’un stress financier peut avoir une incidence sur notre santé (comme l’ont démontré plusieurs études), ils sont de plus en plus nombreux à être favorables à l’adoption d’un revenu minimum pour tous.

Bien que le débat prenne de l’ampleur, le concept de revenu de base est en fait une vieille idée qui revient simplement à la mode. Dès les années 1790, elle a été défendue aux États-Unis par Thomas Paine, avant d’être mise à l’essai au Manitoba dans les années 1970. Aujourd’hui, la Finlande, le Kenya et la ville d’Oakland, en Californie, mènent des projets pilotes pour la tester.

En avril 2017, le gouvernement ontarien a annoncé qu’il lancerait un projet pilote afin d’évaluer si un revenu de base pourrait améliorer la qualité de vie de ses citoyens. Les gens qui ont du mal à joindre les deux bouts ont tendance à tomber plus souvent malades que ceux qui ont suffisamment d’argent pour subvenir à leurs besoins essentiels. De plus, un rapport du gouvernement affirme qu’ils sont plus à risque de vivre certains problèmes comme la toxicomanie et les difficultés scolaires.

En leur assurant un revenu minimum pour répondre à leurs besoins, non seulement leur santé s’en trouverait améliorée, mais cela aurait pour effet de décongestionner le système de santé ontarien.

En leur assurant un revenu minimum pour répondre à leurs besoins, non seulement leur santé s’en trouverait améliorée, mais cela aurait pour effet de décongestionner le système de santé ontarien. « Une personne qui dispose d’un peu plus d’argent sera moins stressée. Elle pourra se permettre de travailler 8 heures par jour plutôt que 10 et prendra davantage soin d’elle, croit Amin Mawani, professeur de fiscalité agrégé de la Schulich School of Business de l’Université York. Le gouvernement ontarien espère qu’il pourra en partie financer ce programme grâce aux économies faites avec la diminution des réclamations d’assurance-maladie. » Le coût prévu du projet est d’environ 50 millions de dollars par année.

D’une durée de trois ans, ce projet versera un montant de 17 000 dollars par année par personne, ou 24 000 dollars par couple (davantage en cas d’invalidité), à 4000 résidents de Thunder Bay, de Lindsay et de la région de Hamilton-Brantford, ainsi qu’à une communauté des Premières Nations qui n’a pas encore été désignée. Ceux-ci n’auront pas à se rendre à un bureau d’aide sociale pour remplir de la paperasse, mais recevront plutôt un chèque par la poste.

Le programme, qui sera évalué par une tierce partie, prendra également en compte un groupe témoin qui ne recevra aucune prestation, ou une version réduite. « C’est une expérience audacieuse », admet Amin Mawani.

Par le passé, on a plus souvent débattu du concept de revenu de base qu’on ne l’a mis en application, mais les inquiétudes suscitées par l’automatisation de plusieurs sphères du marché du travail ramènent le sujet sur le tapis. Depuis 2000, environ 5 millions d’emplois manufacturiers ont été supprimés aux États-Unis. Au Canada, 40 % des emplois (manufacturiers, mais aussi d’autres secteurs) risquent de disparaître dans les 10 prochaines années en raison de l’automatisation, selon une récente étude de McKinsey & Co.

Reste que le revenu de base soulève encore des préoccupations. « Le problème, c’est que cette solution n’est pas adaptée aux différents cas de figure », explique Amin Mawani. Par exemple, si on éprouve de soudaines difficultés financières, on devra attendre avant de recevoir des prestations puisqu’elles sont déterminées en fonction de notre déclaration de revenus de l’année précédente. De plus, les personnes invalides risquent de perdre d’autres services et allocations, puisque le programme d’aide sociale Ontario au travail disparaîtrait, ainsi que le Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées.

Alex Laurin, directeur de la recherche à l’lnstitut C.D. Howe, affirme que les parents seraient aussi perdants puisqu’ils n’auraient plus droit à certains remboursements au fédéral et au provincial. Selon lui, le revenu minimum garanti pourrait aussi encourager certaines personnes à ne pas travailler, sans compter que les résidents de petites villes comme Lindsay en auront plus dans leurs poches que ceux qui vivent à Hamilton où le coût de la vie est plus cher.

Alex Laurin fait aussi valoir que ce programme pourrait entraîner une hausse des impôts ou des compressions dans les soins de santé, ce qui pénaliserait paradoxalement ceux qui en bénéficient.

Quoi qu’il en soit, il est encore trop tôt pour savoir s’il est réaliste de garantir un revenu modeste, mais fixe, à tous les citoyens. D’ici quelques années, nous devrions avoir les données pour déterminer si cette solution peut contrer les conséquences les plus préoccupantes (et les plus coûteuses) de la pauvreté, que ce soit en Ontario ou ailleurs dans le monde.

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