Pour vous sentir bien dans votre peau, aimez-vous les bains de glace ou tentez-vous de concocter des recettes anti-âge? Une chose est certaine : le bien-être est en tête des priorités des gens en 2024. Cette fixation sur le bien-être et les soins personnels se reflète également dans nos habitudes financières, comme par l’adoption de tendances telles que les mois « zéro dépenses » et la transparence budgétaire. Mais ces tendances sont-elles vraiment bénéfiques pour nos finances? Pour y répondre, il est important de prendre du recul et de les évaluer de manière critique.
Au Canada, nous devons constamment composer avec les dernières modes en matière de placements et d’habitudes financières, chacune promettant des rendements intéressants. Elles se révèlent souvent décevantes, surtout en raison de leurs coûts parfois importants. Les spécialistes du marketing savent profiter de ces tendances, comme l’investissement autonome, qui a motivé des centaines de milliers de personnes inexpérimentées au Canada à spéculer. Souvent, cette stratégie s’est traduite par d’importantes pertes.
De même, des technologies telles que les jetons non fongibles (« JNF ») ont initialement attiré des millions de dollars en investissements personnels et été saluées comme des occasions lucratives. Cependant, elles sont aujourd’hui largement critiquées après avoir causé d’importantes pertes financières à de nombreuses personnes. Ces modes promettent souvent la lune, mais le jeu n’en vaut pas toujours la chandelle et nuit au sentiment de bien-être des Canadiennes et Canadiens ainsi qu’à leur santé financière.
Heureusement, les équipes de recherche en sciences sociales étudient le bien-être financier de la population depuis des décennies et peuvent nous guider en ce sens. Leurs études nous aiguillent sur les manières de bien gérer nos finances pour atteindre un grand bien-être.
Qu’est-ce que le bien-être financier?
En tant que spécialiste agréé du comportement financier, je définis le « bien-être financier » comme le fait de pouvoir :
- payer sans problème ses factures à temps;
- se sentir en confiance par rapport son avenir financier;
- profiter des plaisirs de la vie, en toute liberté.
Cela implique que le bien-être financier permet aux consommateurs d’être en plein contrôle de leurs finances, d’atteindre leurs objectifs financiers, de se sentir en paix financièrement et d’éviter les erreurs coûteuses. Fort de cette compréhension, le Consumer Financial Protection Bureau a publié en 2015 une étude détaillée décrivant quatre domaines essentiels à l’atteinte du bien-être financier.
- Le suivi rigoureux des finances au jour le jour et d’un mois à l’autre : Comprendre ses dépenses et les comparer avec ses revenus afin de gérer ou de rembourser efficacement ses dettes.
- La capacité d’absorber un choc financier : Disposer d’un fonds d’urgence qui permet de faire face à des dépenses imprévues ou à une épreuve importante, comme une perte d’emploi, des frais médicaux, des rénovations urgentes, des visites chez le mécanicien, le décès soudain d’un conjoint, etc.
- La capacité d’atteindre ses objectifs financiers à long terme : Épargner activement en vue d’objectifs importants, comme un mariage, un congé sabbatique ou la retraite.
- La pleine liberté financière de faire des choix qui procurent du bonheur : Avoir le temps et les ressources nécessaires pour des choses qui vous procurent du plaisir, comme un passe-temps ou un grand voyage.
La recherche universitaire sur le bien-être financier porte principalement sur les aspects objectifs et empiriques de nos finances : les sources de revenus, l’épargne, les placements, les cotes de crédit, les dettes, les emprunts hypothécaires et les versements d’impôts. Elle part du principe que si ces éléments techniques sont respectés, nous sommes en bonne voie d’atteindre le bien-être financier. Cependant, elle néglige souvent notre sentiment de bonheur et de satisfaction — deux éléments qui peuvent influencer notre perception globale du bien-être financier.
Comment gérons-nous notre argent?
Un récent sondage Consumer Pulse révèle que 32 % des ménages canadiens ont du mal à rembourser leurs dettes. Ces résultats concordent avec ceux de FP Canada, selon lesquels l’argent est le principal facteur de stress pour 44 % des personnes interrogées. Les données portent à croire que le stress financier augmente au Canada. Par exemple, l’Agence de la consommation en matière financière du Canada (ACFC) indique que trois personnes sur quatre estiment avoir une bonne ou assez bonne situation financière. La population canadienne dans l’ensemble semble donc bien s’en sortir sur le plan financier.
Mais le bien-être financier des gens semble résider essentiellement dans de saines habitudes financières plutôt que dans le revenu ou l’épargne. Le rapport de l’ACFC suggère que les facteurs subjectifs, comme la confiance et la vision des gens à l’égard des dépenses, de l’épargne et des placements, jouent également un rôle primordial dans le bien-être financier.
Bien qu’il soit important de tenir compte du revenu et d’autres éléments financiers mesurables, nos comportements et notre mentalité à l’égard de nos finances contribuent fortement à notre bien-être financier global.
Je ne veux pas ici sous-estimer l’importance des mesures objectives. Cependant, pour atteindre un véritable bien-être financier, nous ne pouvons pas nous contenter de chercher des moyens d’augmenter nos revenus ou d’épargner. Il s’agit également de bien saisir notre situation financière et de faire confiance à nos capacités à prendre des décisions financières judicieuses.
Étant donné que le bien-être financier fait partie intégrante du bien-être subjectif, qui porte sur nos sentiments à l’égard de notre vie en général et de nos expériences personnelles, nous avons tout intérêt à tenir compte de notre perception des finances et de la relation que nous entretenons avec l’argent dans notre définition du bien-être financier.
Quel est le rapport entre nos sentiments à l’égard de l’argent et le bien-être?
En 2017, une étude menée par Brüggen et al. a mis en évidence l’importance de nos sentiments et de nos croyances à l’égard de l’argent. Par exemple, même si deux personnes ont le même montant en banque, elles peuvent percevoir leur santé financière de manière diamétralement opposée. Ce qui compte, ce n’est pas seulement ce que vous avez, mais également la perception de vos finances. En 2018, Netemeyer et al. sont parvenus à une conclusion similaire, démontrant que malgré des situations financières comparables, les gens perçoivent souvent leur bien-être financier de manière très différente.
Lorsque vous réfléchissez à votre propre bien-être financier, gardez à l’esprit que votre situation financière ne se limite pas à ce qui se trouve dans votre compte en banque. Elle contribue à votre santé mentale, à votre bonheur, à vos relations interpersonnelles et à votre satisfaction globale. Certes, le remboursement des dettes et l’épargne-retraite donnent un bon indice de la santé financière d’une personne, mais ils ne garantissent pas le sentiment de bien-être financier.
Ce sentiment englobe aussi la perception de vos finances et les émotions qu’elles suscitent. Croire en votre capacité à bien gérer votre argent et sentir que votre mode de vie s’arrime avec vos décisions financières peut améliorer votre bien-être financier.
La façon dont vous percevez votre situation financière joue un rôle extrêmement important.
En 2024, le bien-être financier ne se résume plus au solde de votre compte en banque ou à vos revenus. Il provient à la fois d’une solide stabilité financière et de notre introspection individuelle par rapport à notre situation financière. Le but est de trouver un équilibre entre paiement des factures et épargne pour l’avenir, tout en cultivant une relation saine avec l’argent. En gérant vos dettes, votre épargne et vos dépenses en fonction de vos valeurs et de ce qui fait vraiment votre bonheur, non seulement vous prenez bien soin de vos finances, mais vous en éprouvez également une plus grande satisfaction.
Traduction d’un article de Shaun Maslyk, CFP, publié par MoneySense dont la diffusion a été autorisée par DiveMarketplace d’Industry Dive. Pour toute question sur les droits de reproduction, contactez legal@industrydive.com.
