La banque centrale s'attend désormais à ce que l'inflation annuelle poursuive sa tendance à la hausse et atteigne en moyenne 4,75 % d'ici la fin de l'année, avant de s'établir à 3,4 % pour l'année prochaine. Elle prévoyait précédemment que l'inflation reculait à 2,4 % en 2022, avant de revenir à son objectif de 2,0 % en 2023.
Cette accélération de l'inflation est alimentée par des forces mondiales qui ont occasionné des goulots d'étranglement dans les chaînes d'approvisionnement, ce qui a fait croître les coûts pour les entreprises et limité l'offre de biens en forte demande. La banque s'attend à ce que les problèmes d'approvisionnement atteignent leur point culminant à la fin de l'année.
À ces pressions s'ajoutent les prix plus élevés de l'essence et du gaz naturel, ainsi qu'une progression des prix de certains services en personnes comme les hôtels et les billets d'avion.
Le gouverneur de la Banque du Canada, Tiff Macklem, a indiqué que la hausse des prix représentait un défi pour les Canadiens, compliquant le règlement de leurs factures, mais que cette inflation devrait s'atténuer à mesure que les problèmes temporaires se résolvent.
Et si cela ne devait pas être le cas, la banque centrale a le pouvoir d'agir pour garder l'inflation sous contrôle et la ramener dans sa zone de confort, ce qu'elle n'hésiterait pas à faire, a-t-il poursuivi.
«Nous comprenons en quoi consiste notre travail. Notre travail consiste à nous assurer que les augmentations de prix que nous avons constatées pour de nombreux produits commercialisés dans le monde ne se répercutent pas et ne se traduisent pas par une inflation soutenue et nous allons faire notre travail», a-t-il indiqué aux journalistes lors d'une conférence de presse en fin de matinée.
«S'il y a de nouveaux développements, nous commençons à voir que cela se concrétise, nous accélérerons nos actions pour ramener l'inflation à l'objectif.»
La banque centrale a estimé que l'économie avait suffisamment rebondi pour qu'elle mette fin à son programme d'achat d'obligations du gouvernement, qui visait à abaisser les taux d'intérêt. La reprise est cependant loin d'être terminée, ce qui explique pourquoi elle a maintenu son taux directeur à 0,25 %.
Des hausses de taux plus rapides que prévu
En mettant fin à ses achats obligataires, la banque cessera de stimuler l'économie et maintiendra plutôt ce qui est déjà là.
M. Macklem a estimé qu'il était «raisonnable de s'attendre» à ce que la nouvelle phase d'assouplissement quantitatif soit maintenue au moins jusqu'à ce que la banque relève son taux directeur, ce qui pourrait se produire plus rapidement que prévu.
Dans ses perspectives de mercredi, la banque a suggéré que les augmentations des taux d'intérêt pourraient commencer plus tôt que prévu, dès le deuxième trimestre de 2022, «même si les défis tout à fait inhabituels associés à la réouverture de l’économie rendent ces prévisions plus incertaines que d’ordinaire».
L'économiste Sri Thanabalasingam, de la Banque TD, s'attend à ce que la Banque du Canada augmente ses taux trois fois l'année prochaine, pour porter son taux directeur à 1,0 % d'ici la fin de 2022, à mesure que l'économie s'améliorera.
«Cela dit, nous devons reconnaître qu'il existe actuellement une incertitude importante concernant les perspectives économiques», a écrit M. Thanabalasingam dans une note. «Une résurgence de la pandémie pourrait entraîner une plus grande stimulation, mais s'il y a une accélération plus rapide que prévu des dépenses des ménages, la banque pourrait augmenter les taux plus rapidement.»
Dans son rapport sur la politique monétaire, la Banque du Canada a révisé à la baisse ses prévisions de croissance pour l'économie canadienne cette année et table maintenant sur une progression de 5,1 %, comparativement à 6,0 % dans ses prévisions précédentes. En outre, la croissance économique devrait s'établir à 4,3 % l'an prochain, alors que la banque centrale misait précédemment sur une progression de 4,6 % pour 2022.
La banque centrale a prévenu que la croissance pourrait ralentir en cas de résurgence des cas de COVID-19, évoquant certaines études qui montrent que l'immunité procurée par les vaccins pourrait diminuer plus rapidement qu’anticipé.
D'un autre côté, les ménages pourraient décider plus hâtivement de commencer à dépenser une partie de leur épargne s'ils se sentent plus à l'aise avec les taux de vaccination élevés, ce qui augmenterait la demande et aggraverait les pressions inflationnistes.
Pénuries de main-d'oeuvre et inflation
Les perspectives préviennent que les facteurs temporaires à l'origine de l'inflation pourraient devenir encore plus persistants et entraîner une croissance des salaires, qui alimente elle-même une spirale inflationniste.
Bien que le pays ait récupéré les trois millions d'emplois perdus l'an dernier au plus fort de la crise de la COVID-19, le chômage reste supérieur à ses niveaux d'avant la pandémie, et il ne s'agit là que d'un indicateur parmi d'autres qui, selon M. Macklem, doivent encore s'améliorer.
La banque centrale a souligné que les pénuries de main-d'oeuvre pourraient persister alors que de plus en plus de Canadiens sans emploi cherchent à acquérir de nouvelles aptitudes et à quitter certaines industries, comme celles des restaurants et des bars, qui ont besoin de travailleurs.
Jusqu'à présent, la croissance des salaires est restée égale ou inférieure aux niveaux d'avant la pandémie, mais M. Macklem affirme que la banque est attentive à la possibilité que les changements attribuables au fait que les entreprises tentent d'attirer et de retenir des employés n'exacerbent pas l'inflation.
Jordan Press, La Presse Canadienne
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