Lire la Revue des marchés du T1 de 2024
Si l’on excepte l'engouement pour les actions virales qui a suivi la pandémie en 2021, la dernière fois que nous avons vu une telle activité sur le marché remonte à 11 ans, au premier trimestre de 2013. Mais remontons donc à plus tôt, en 2012. Il est possible d’établir un parallèle à plusieurs égards entre cette année-là et 2023 : les deux ont affiché une faiblesse au printemps, puis à la fin de l’été et au début de l’automne du fait d’un ralentissement en milieu de cycle, après la crise financière mondiale), avant de se redresser vigoureusement au quatrième trimestre. En fin de compte, 2012 aura dans l’ensemble procuré de solides rendements. L’année 2013 a ensuite démarré en fanfare, avec des rendements très comparables à ceux de 2024; le marché a progressé de 11 % au premier trimestre, après avoir atteint de nouveaux sommets lors de 40% des jours de bourse, ce qui ressemble fort aux dernières tendances.
Était-ce le signe d’une reprise, ou les actions étaient-elles condamnées à redescendre? Il faut commencer par admettre que la volatilité est indissociable des marchés boursiers. Un repli de 5 % s’inscrit dans ce que nous appellerions le fonctionnement normal du marché. Une chute de plus de 10 % du cours des actions (autrement considérée comme une correction) serait plus significative. Mais là encore, cela serait tout à fait normal, étant donné que des corrections se produisent tous les deux ans environ, pour toutes sortes de raisons plutôt imprévisibles. L’appréciation impressionnante de 31 % de l’indice S&P 500 en 2013 a ainsi été suivie d’un repli de 5 % au premier trimestre de 2014. Cette variation était totalement imprévisible, sauf à considérer qu’il s’agissait d’un événement de marché on ne peut plus normal. L’avenir pourrait donc tout à fait nous réserver de la volatilité. Quels sont les déclencheurs probables? La déception à l’égard de l’action de la Réserve fédérale américaine, ou plutôt de son inaction, reste une cause habituelle. D’autres facteurs pourraient toutefois également peser. Quoi qu’il en soit, une chose est certaine : il y aura à un moment ou à un autre une mauvaise semaine, et elle ne sonnera pas nécessairement la fin de la reprise.
Au cours des 100 dernières années, le recul moyen sur six mois a été de 6 %. Le recul hebdomadaire sur six mois est actuellement inférieur à 0,5 %. La baisse a à peine le temps d’être enregistrée qu’elle s’inverse déjà. L’odieuse intervention de la Fed dite « Fed put » (mesures prises par la Réserve fédérale américaine pour venir au secours des marchés) est peut-être chose du passé, mais elle a cédé la place à une version extrême de la pratique d’achat à la baisse (achat d’actions lorsque leur valeur chute). Étant donné la masse de capitaux toujours sous forme de liquidités et la perspective de voir les taux à court terme baisser plus tard dans l’année, le marché a encore de la ressource. Même les sociétés sont à la manœuvre, si l’on en croit les rachats d’actions qui s’annoncent considérables et la raréfaction des émissions d’actions.
Il est bon de signaler que les actions technologiques ne sont plus les seules à avoir la faveur des investisseurs. En fait, ces derniers chassent les aubaines dans les secteurs cycliques, les services financiers et partout où ils espèrent trouver rapidement de l’alpha (rendements supérieurs à l’ensemble du marché). Les facteurs saisonniers devraient probablement aussi soutenir le rendement au cours des premiers mois du deuxième trimestre, au moins jusqu’en juin. De favorables, les facteurs saisonniers devraient devenir défavorables, car juin est historiquement le deuxième mois le plus faible de l’année.
En résumé, ne pariez pas contre le marché en vous fondant uniquement sur l’idée qu’il progresse trop vite. S’il existe de nombreuses raisons légitimes de douter, l’histoire montre que sa croissance rapide ne saurait à elle seule justifier ce scepticisme.
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